Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de Meryama

"Nous sommes à Dieu et c'est à lui que nous retournons"

28 Juillet 2008 , Rédigé par mariamfilali.over-blog.com Publié dans #خواطر

27688_402408872301_225057762301_4040589_2371335_s.jpg

C’était ma dernière rencontre avec lui, mon intuition ne m’a jamais trahit, ce WE que j’ai passé à Fès était particulier , je ne voulais pas sortir, je n’ai eu bizarrement qu’une seule envie, c’est rester avec mon grand père maternel et discuter avec lui . Nous avons fait le tour, nous avons parlé de tout, il me répétait à chaque fois combien il appréciait ma sagesse et ma façon de voir les choses et moi, je lui disait combien il nous est très cher.

 

Lui aussi était intuitif, il savait qu’il ne lui restait que quelques jours, et il était prêt pour partir . Je n’oublierai jamais cette phrase qu’il m’a répété ce jour là : « Ma fille, j’ai accomplit ma mission sur terre, sayez, je veux partir ». Lui aussi a eu cette étrange sensation que c’était sa dernière conversation avec moi. Bien évidemment qu’il a bien accomplit sa mission , je n’ai jamais vu durant toute  ma vie un homme qui rassemble autant de qualités : un homme fort de caractère, battant, charismatique, très intelligent, pragmatique, persévérant, qui a bon cœur , engagé , pieu, sage , visionnaire , généreux, diplomate,…

 

Un homme très organisé, très propre, qui ne ratait jamais la prière de "lfajr", qui considérait le jour du vendredi comme un jour de fête, qui avait une excellente hygiène de vie, qui aimait voir notre famille toujours soudée et solidaire …

Alors que j’étais avec lui, des voisins que je ne connaissais pas sont venus lui rendre visite, il m’a alors présenté avec une très grande fierté « Regardez, voilà ma petite fille, ma petite fille Meryem » , l’un de ses voisins lui a dit « Allahoumma j3alha mimmane yastami3ouna l9aoula fa ya yatabi3ouna a7sanahou » et mon grand père a dit  « amine », en traçant sur son visage un très joli sourire, comme s’il voulait dire qu’il ne voulait que ca pour moi , que je reste toujours sur la bonne voie.

 

J’aurais souhaité que je reste encore avec lui, mon cœur battait à chaque fois que je ressentais que c’était la dernière fois que je le vois, mais il fallait partir. Je suis montée dans la voiture, puis je suis redescendue, il fallait que je fasse les adieux bien comme il faut. Je ne me cessais de me répéter que c’est la dernière fois,je me suis dirigée alors vers mon grand père , je lui ai fait un baise main tendre et affectueux. Je le savais, je le sentais, c’était le dernier baise main.

 

 

Une semaine plus tard, le téléphone sonna vers deux heures du matin, ca ne pouvait  être que ce que j’ai présenti. Ma mère me réveilla, j’ai essayé de me mettre debout, j’ai trébuché, je n’arrivais pas à me lever. Je n’ai jamais ressenti ce sentiment, j’ai essayé de nouveau et je n’arrivais toujours pas. Mon cœur battait la chamade, j’arrivais à peine à respirer, j’avais des jambes comme du coton et je n’arrivais plus à placer un seul mot. J’ai commencé à lire quelques sourates du coran pour me donner la force, car je savais ce qui allait arriver.

 

Ma mère appela de nouveau la maison à Fès, Mon grand père avait été transporté d’urgence à la clinique, j’essayais de la consoler, « il est juste malade … ca va aller… pas de panique… prions pour lui ».Mais , en réalité , je savais que c’était la fin. Ma mère me demanda dix minutes après d’appeler la clinique, j’ai décroché le téléphone en tremblant comme une feuille , j’ai demandé des nouvelles, et une voix m’a répondu : « lbaraka f raskoum… » .Pâle comme la mort , j’ai fixé ma mère du regard en m’efforçant de ne pas perdre la voix et j’ai dit « Inna lillahi wa inna ilayhi raji3oune » et puis ma gorge se noua , et j’ai ajouté en anticipant la réaction de ma mère : « maman , innama sabrou 3inda sadmati l2oula ».

 

Toute la famille, se dirigea alors vers Fès , je suis restée à la maison , pour les rejoindre le lendemain avec ma tante et mes cousins .La nuit fut longue, très longue. Je n’ai pas arrêté de prier pour mon grand père, pour ce grand chef de famille, pour ce grand battant, pour ce grand homme. J’ai eu aussi le réflexe de lire  la sourate « Yassine », une sourate qui a dû certainement apporter soulagement pour mon grand père en ces moments.

 

Les 198  km qui nous séparent de Fès devinrent 1980 Km, je voulais arriver vite, je baignais dans la tristesse. Arrivée à Fès, je n’ai pas voulu jeter un dernier regard sur la dépouille de mon grand père –que Dieu ait son âme-, je n’ai pas voulu le voir allongé. Je voulais que mon dernier contact avec lui soit ce baise main plein de tendresse que je lui ai fait, ce regard de bénédiction, et cette voix imposante me disant « que Dieu te bénisse, que Dieu te bénisse »

 

Durant les deux jours qui suivirent la mort de mon grand père, je n’ai pas quitté ma chère maman, qui, envahit par une profonde amertume, frôlait la déplume, ses yeux devinrent ternes . Elle venait de perdre son papa, son ami et son confident .Je mesurais sa peine. Heureusement, papa était là pour elle, heureusement nous étions tous là pour elle, pour ma tante et pour ma grand-mère. Nous nous sommes consolés avec beaucoup d’affection et d’amour.

 

Après avoir fait le deuil de mon grand père, j’ai repris mon travail, peinée, maussade, j’avais la vague à l’âme. A chaque fois que je marchais dans le rue, j’avais envie de crier très fort et de dire à tout le monde combien je suis triste, mais je ne l’ai pas fait, car j’étais convaincue que les consolations des gens ne soulageraient pas ma peine. J’ai crié chez moi, j’ai pleuré chez moi, jamais je n’ai versé des larmes aussi grosses, des larmes de  chagrin, des larmes de tristesse. J’ai prié avec humilité et Dieu m’a aidé à dépasser cette dure épreuve.

Le décès de mon grand père maternel aussi éprouvant soit-il, m’a rendu plus forte, beaucoup plus forte.

 

Grand père, je ne t’oublierai jamais. Grand père si tu savais seulement que je n’arrêtte pas de prier pour toi, Grand père si tu savais la peine que j’ai ressenti en passant à côté d’une parfumerie à la rue Montaigne à Paris, je me suis dit que si tu étais encore en vie, je m’aurais fait l’immense plaisir de t’acheter ton parfum préféré. Mais tu sais, tu mérites mieux qu’un parfum, mieux qu’une montre luxueuse, mieux qu’une chemise signée ,… mieux que toutes les belles choses qui se trouvent sur cette terre.

 

Le cadeau que je te fais mon grand père , c’est de rester fidèle aux principes que tu nous a appris moi et mes frères et sœurs , les principes d’honnêteté , d’engagement , de pardon , d’aimer sans attendre une contrepartie, d’aider les autres , de « faire du bien et l’oublier », de traiter les « ennemis » comme des amis, de donner tout ce qu’on peut , … et beaucoup d’autres principes , oh combien difficiles à appliquer de nos jours.

 

Grand père, je suis sûre et certaine que Dieu te fera le cadeau auquel nous aspirons tous : le paradis, inchallah.

 

Grand père, la maison est devenue sans âme avec ta disparition. Grand père, ta sagesse me manque, tes conseils érudits me manquent, ton amour me manque, ton intelligence me manque, tu me manques Grand père, et tu me manqueras toujours.

 

Grand père, je sentais que je n’allais plus te revoir lors de notre dernière rencontre, je voulais te dire combien je t’aime, mais je me suis malheureusement retenue, en essayant de croire que j’aurais l’occasion de te le dire une autre fois, je refusais de croire que c’était la dernière fois. Et depuis ce jour, je n’hésite jamais à dire aux personnes que j’aime que je les aime.

 

Grand père , je t’aime . Grand père , tu seras fier de moi inchallah , je te le promets .Grand père, que Dieu ait ton âme en sa sainte miséricorde.

 

« Nous sommes à Dieu et c’est à lui que nous retournons »

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article